kalinka-machja CERCLE CULTUREL ET HISTORIQUE CORSE-RUSSIE-UKRAINE

1815. La Russie dans le concert européen. Conférence de Thierry LENTZ.




Le Cercle Culturel et Historique Corse-Russie-Ukraine ne saurait ignorer la particulière (et remarquable)  contribution de Thierry LENTZ à la connaissance de la vie et l’œuvre de Napoléon.
Thierry LENTZ est notamment directeur de la Fondation Napoléon (en LIEN sur notre site). C’est donc en toute logique que nous vous invitons à visionner une vidéo-conférence de cet auteur et historien sur le thème : 1815 . La Russie dans le Concert Européen :
https://www.youtube.com/watch?v=tj49_lfvDU4&t=3654s

 
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Un portrait de Thierry LENZ emprunté au site L’HISTOIRE  (www.lhistoire.fr) permet de situer le parcours de l’auteur et de mesurer l’étendue de sa contribution au culte napoléonien.
J.M
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https://www.lhistoire.fr/portrait/thierry-lentz-le-confident-de-lempereur



Clara Dupont-Monod dans mensuel 359

Daté décembre 2010


Il a grandi en Moselle dans un milieu ouvrier. Il a découvert Napoléon à 10 ans. Depuis 2000, il dirige la Fondation Napoléon.
 
« Je sais, je ne fais pas partie du sérail » , confie Thierry Lentz. En effet, on peut être surpris en découvrant que l’actuel directeur de la Fondation Napoléon, institution privée de recherche historique sur les deux empires français, est un enfant du milieu ouvrier. Thierry Lentz a grandi en Moselle, dans le bassin sidérurgique d’Hagondange. « Quand je revois mes copains lorrains, je retrouve vite l’accent du coin » , s’amuse-t-il.
 
Son père, qui a commencé à travailler au début des années 1950 comme ouvrier à l’usine Wendel, finira agent de maîtrise. Thierry Lentz grandit comme tous les enfants d’ouvriers d’alors. Ses camarades d’école sont yougoslaves ou maghrébins. Il connaît la route de l’usine, qui sillonne au milieu des champs. Il assiste à la fin de l’âge d’or de la sidérurgie et du paternalisme industriel. « Ce lien avec un monde du travail rigoureux, solidaire, m’a permis de ne jamais perdre pied » , raconte-t-il.
 
Thierry Lentz vous fait visiter la Fondation avec enthousiasme. « Vous avez vu ? souffle-t-il en montrant des lecteurs penchés sur de gros ouvrages ou des écrans d’ordinateurs dans la bibliothèque. Ce sont tous des bénévoles, ils travaillent sur la correspondance de Napoléon. »
 
Ses racines l’ont aussi sensibilisé à l’histoire : un jeudi sur deux, l’enfant profitait des souvenirs de son grand-père, né allemand, devenu français en 1918 et ancien combattant français de 1939-1945 dans une région tantôt allemande tantôt française entre 1870 et 1945. Son arrière-grand-père, lui, avait combattu dans l’armée allemande durant la Grande Guerre... Né en 1959, en pleine réconciliation franco-allemande, Thierry Lentz garde « une part germanique très forte. Une sorte de rigueur ». Est-ce un hasard si la première chose qu’il dit aujourd’hui pour parler de Napoléon est : « Il a remis de l’ordre » ?
Thierry Lentz découvre Napoléon alors que la France fête le bicentenaire de sa naissance, en 1969. Il a 10 ans ; dans les stations-service, on distribue des pièces à l’effigie de l’Empereur. Napoléon raconté à tous les enfants, de Raoul Guillaume, édité chez Nathan, circule entre les voisins. Plus tard, aux « Dossiers de l’écran », André Castelot, dont Thierry Lentz a particulièrement aimé le Bonaparte , se dispute avec Jean Tulard, le pape de l’histoire universitaire. C’est sa première rencontre, par écran interposé, avec Jean Tulard, dont il deviendra le disciple.
 
Très vite, il s’aperçoit que Napoléon suscite un peu vite l’émotion. Napoléon charrie les passions : pour les uns visionnaire, conquérant, architecte du patriotisme ; pour d’autres tyran sanguinaire, égocentrique doublé d’un imposteur. Thierry Lentz, cependant, ne confond pas le fantasme avec l’approche historienne. S’il avoue une grande admiration pour le Premier consul, il se montre plus réservé sur l’Empereur. Mais il s’agit toujours pour lui de « dédramatiser l’histoire napoléonienne » . Ainsi, dans sa Nouvelle Histoire du Premier Empire dont le tome IV vient de paraître chez Fayard, il raconte les Cent-Jours, ces trois mois durant lesquels le vainqueur d’Austerlitz perdit tout son prestige tandis que l’Europe affirmait sa puissance. « Au fond, Napoléon m’intéresse moins que son époque. J’y vois un carrefour : la France sort de mille ans d’Ancien Régime, d’une Révolution brouillonne, et, on pourrait dire : soudain la stabilisation. » La prise en compte du contexte lui fait souligner, par exemple, combien les guerres napoléoniennes s’inscrivirent en continuité avec les luttes précédentes, notamment contre les Anglais. « L’intelligence des Anglais a été de pousser Napoléon à bout : dans la lutte à mort, les Anglais sont souvent gagnants. »
 
Pourtant, à l’université, Thierry Lentz ne choisit pas l’histoire. Il fait aujourd’hui partie des rares historiens qui n’affichent pas un cursus classique : un baccalauréat section économie, puis des études de droit à la faculté de Nancy... Néanmoins, Napoléon l’a rattrapé. Son mémoire de maîtrise de droit public, réalisé sous la houlette de Frédéric Bluche, spécialiste du bonapartisme, porte sur « L’administration préfectorale en Moselle sous le Consulat et l’Empire » 1981. Il sera suivi en 1986 - il n’a que 27 ans - d’un livre sur la Moselle et Napoléon.
 
Depuis ses 18 ans, Thierry Lentz travaille, parallèlement à ses études, pour gagner sa vie. Il enchaîne les postes de surveillant, de chargé de cours dans les universités de Metz et Nancy, devient assistant parlementaire du député de la Moselle Robert Malgras, élu de la vague rose de 1981... Jusqu’au moment où il répond à une petite annonce du groupe Saur, spécialisé dans la gestion de l’eau et des déchets, dont Bouygues est l’unique actionnaire. Le groupe recherche un directeur des relations extérieures. Ce sera lui.
Suivent treize années de bonheur : une collaboration étroite avec Martin puis Olivier Bouygues, des voyages incessants... Et Napoléon qui ne le quitte pas. Dans l’avion, Martin Bouygues sourit lorsqu’il voit Thierry Lentz lire un ouvrage sur le despotisme éclairé.
 
Les parutions s’enchaînent : Le 18-Brumaire : les coups d’État de Napoléon Bonaparte , qui lui vaudra le prix de la Fondation Napoléon en 1997, L’ABCdaire de Napoléon et l’Empire avec Gérard Gengembre, Adrien Goetz et Jacques Jourquin, paru chez Flammarion en 1999, le Dictionnaire des ministres de Napoléon Christian-Jas, 2000, Le Grand Consulat Fayard, 1999...
 
Thierry Lentz combat tous les mythes. Alors que la droite fait de Napoléon un héros grandi en son sein, Thierry Lentz rappelle qu’il a été rejeté par la droite, en toute logique : il était enfant de la Révolution. Alors que la gauche en fait le symbole repoussoir de l’ordre social et moral, il démontre que le système napoléonien, loin de se restreindre à un système policier, institua un État de droit.
 
Idéologiquement irrécupérable, scientifiquement irréprochable, Thierry Lentz attire bientôt l’attention de la Fondation Napoléon. En 2000, il en devient directeur il succède à Béatrice de Durfort. Il continue depuis à publier et vient de superviser la réédition des Mémoires de Napoléon , commencés sur le Northumberland , le vaisseau qui le transportait à Sainte-Hélène, et achevés dans sa maison de Longwood, en 1821, quelques semaines avant sa mort.
 
La campagne d’Italie , qui compose le premier tome, a lancé le « mythe du sauveur », comme l’a écrit Jean Tulard. On y voit se déployer, sur dix-huit mois de guerre et de questions diplomatiques, à la fois l’implacable stratégie d’un général doublé d’un homme politique et l’autopromotion d’un mémorialiste qui, de façon rétrospective, agence les événements selon une logique prédestinée...
 
Qu’importe la vision déformante, écrit Thierry Lentz : « malgré et grâce à cela, cette Campagne d’Italie est un excellent livre d’histoire » - façon habile, encore, d’échapper à l’interprétation passionnelle pour retenir le contexte, les rouages, la logique d’une plume et celle d’un dessein ; en un mot sa valeur documentaire.
Suivront les parutions de La campagne d’Égypte , un texte longtemps gardé par le général Bertrand, et L’Ile d’Elbe et les Cent-Jours . De quoi tenir encore en éveil Thierry Lentz, l’ancien enfant d’Hagondange devenu intime de l’Empereur.
 
Thierry Lentz supervise chez Tallandier la réédition des Mémoires de Napoléon. Le premier volume est consacré à la campagne d’Italie 2010.